Une entreprise du bâtiment a ouvert un compte auprès d’une société de vente de matériaux de construction lui permettant de différer le paiement de ses achats. Cette ouverture de compte ne se faisait pas sans garantie sachant que la vie de nombreuses entreprises du bâtiment, commerçants ou artisans dont l’existence est souvent de courte durée se solde par une procédure collective.
C’est dans ces conditions, que le gérant de cette société s’est porté caution solidaire des engagements souscrits par sa société. Cette société a fait l’objet d’une liquidation judiciaire et la société de vente de matériaux a régulièrement déclaré sa créance. Elle a assigné la caution en exécution de son engagement.
Le gérant soulève la nullité de son engagement de caution sur le fondement des articles L.341-2 et L341-3 du code de la consommation :
« Toute personne physique qui s’engage par acte sous seing privé en qualité de caution envers un créancier professionnel doit, à peine de nullité de son engagement, faire précéder sa signature de la mention manuscrite suivante, et uniquement de celle-ci : « En me portant caution de X…, dans la limite de la somme de… couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de…, je m’engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si X… n’y satisfait pas lui-même »
« Lorsque le créancier professionnel demande un cautionnement solidaire, la personne physique qui se porte caution doit, à peine de nullité de son engagement, faire précéder sa signature de la mention manuscrite suivante : « En renonçant au bénéfice de discussion défini à l’article 2021 du code civil et en m’obligeant solidairement avec X…, je m’engage à rembourser le créancier sans pouvoir exiger qu’il poursuive préalablement X…. »
La Cour d’appel, considère que ces textes ne sont pas applicables puisque le gérant :
– ne peut être considéré comme un consommateur inexpérimenté et dépassé par ses engagements
– connaît parfaitement la société et comprend le sens du cautionnement lorsqu’il s’engage
– a un intérêt direct dans son entreprise qui est très directement sa chose et il sait qu’il bénéficiera de l’avantage (nécessaire pour lui) proposé par son fournisseur mais en contrepartie de sa garantie personnelle ;
– n’a pas d’ailleurs refusé la compétence du Tribunal de Commerce pour voir statuer sur la demande
Devant la Cour de cassation le gérant réplique :
L’acte de cautionnement doit comporter à peine de nullité les mentions manuscrites exigées par les articles L. 341-2 et L. 341-3 du Code de la consommation les engagements de caution souscrits par toute personne physique au profit d’un créancier professionnel, peu important que la caution soit avertie ou profane et que son engagement présente un caractère civil ou commercial.
Au sens des articles L 341-2 et L. 311-3 du code de la consommation, le « créancier professionnel » s’entend de celui dont la créance est née dans l’exercice de sa profession ou se trouve en rapport direct avec l’une de ses activités professionnelles. Ainsi, en l’espèce, la Cour a elle-même constaté que la créance garantie par le cautionnement du gérant était née dans l’exercice de l’activité professionnelle de la société de vente de matériaux.
La Cour suit cette argumentation et confirme que :
– toute personne physique, qu’elle soit ou non avertie, doit, dès lors qu’elle s’engage par acte sous seing privé en qualité de caution envers un créancier professionnel, faire précéder sa signature, à peine de nullité de son engagement, qu’il soit commercial ou civil, des mentions manuscrites exigées par les textes susvisés.
– le créancier professionnel s’entend de celui dont la créance est née dans l’exercice de sa profession ou se trouve en rapport direct avec l’une de ses activités professionnelles
(Cass com. 10 janvier 2012, n° 10-26630)
Guillaume PIERRE – Avocat à Paris