La révocation d’un ordre de paiement par carte bancaire

Un particulier a fait l’acquisition sur un site internet d’un titre de musique au prix de 0,99 Euros. Après cet achat, il recevait un email lui confirmant son abonnement au site au prix de 9,99 euros par mois. A réception de son relevé bancaire mensuel, il s’est aperçu du prélèvement de 9,99 euros et s’est adressé à sa banque afin de demander l’annulation de cette opération afin qu’il soit mis fin à cet abonnement. Toutefois, les prélèvements de 9,99 euros se sont poursuivis et le client a mis en cause sa banque devant le Juge de proximité.

Le juge de proximité l’a cependant débouté de ses demandes. Il n’est pas contesté qu’il pensait avoir acheté un titre de musique. Toutefois, les pièces produites par les parties et plus précisément les conditions générales de souscription démontrent que cet achat isolé d’un titre de musique sur internet n’était pas possible et qu’il s’inscrivait nécessairement dans le cadre d’un abonnement qui obligeait l’acheteur à commander d’autres titres jusqu’au plafond de la formule choisie. En conséquence, le particulier s’est trompé et ne peut contester a posteriori son engagement de paiement qui est irrévocable.

En effet, l’article L. 132-2 du Code Monétaire et financier dispose que l’ordre ou l’engagement de payer donné au moyen d’une carte de paiement est irrévocable. Il ne peut être fait opposition au paiement qu’en cas de perte, de vol ou d’utilisation frauduleuse de la carte et des données liées à son utilisation, de procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire du bénéficiaire.

Devant la Cour de cassation, le particulier oppose trois arguments :

          Les articles L. 132-4 et L. 132-6 du code monétaire et financier, dans leur rédaction issue de la loi n° 2001-1062 du 15 novembre 2001 applicable jusqu’au 1er novembre 2009, la responsabilité du titulaire d’une carte de paiement n’est pas engagée si le paiement contesté a été effectué frauduleusement, à distance, sans utilisation physique de sa carte ; que la négligence du titulaire n’est pas de nature à décharger l’émetteur de son obligation de recréditer le montant d’une opération qui a été contestée dans le délai de soixante-dix jours, ou dans celui contractuellement prolongé dans la limite de cent vingt jours. En l’espèce, il avait avisé sa banque de l’existence d’un prélèvement mensuel non conforme.

          La banque a refusé d’appliquer le nouvel article L. 133-18 du Code monétaire et financier, issu de l’ordonnance n° 2009-866 du 15 juillet 2009, applicable à partir du 1er novembre 2009 : « En cas d’opération de paiement non autorisée signalée par l’utilisateur dans les conditions prévues à l’article L. 133-24, le prestataire de service de paiement du payeur rembourse immédiatement au payeur le montant de l’opération non autorisée et, le cas échéant, rétablit le compte débité dans l’état où il se serait trouvé si l’opération de paiement non autorisée n’avait pas eu lieu. Le payeur et son prestataire de services peuvent décider contractuellement d’une indemnité complémentaire »

          Enfin, le client n’avait communiqué à distance les données figurant sur sa carte bancaire que pour faire l’achat d’un titre unique de musique, et non pour prendre un abonnement.  Faute d’avoir donné un mandat de payer un tel abonnement, la banque était tenue de restituer la somme débitée.

La Cour de cassation sanctionne une nouvelle fois le juge de proximité faut d’avoir recherché si la contestation formulée par le titulaire de la carte ne valait pas révocation pour l’avenir du mandat donné à sa banque de payer un tel abonnement.

(Cass.com, 27 mars 2012, n° 11-11.275)

Guillaume PIERRE – Avocat à la Cour

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