Le bailleur et l’action en expulsion du sous locataire d’un bail commercial

Une société donne à bail à une société de la grande distribution un local commercial. Ce bail comporte la faculté de sous-louer une partie des locaux. La société de la grande distribution conclu a posteriori un sous bail avec une personne physique pour l’exploitation d’un commerce de chaussures.

La société bailleresse, arguant du défaut de concours à l’acte de sous-location, a assigné la société sa locataire et la sous-locataire pour voir condamner la première à faire cesser la sous-location et voir ordonner l’expulsion de la seconde. En effet, selon l’article L. 145-31 du Code de commerce, en cas de sous-location autorisée, le propriétaire est appelé à concourir à l’acte.

La Cour d’appel ordonne l’expulsion de la sous-locataire, puisqu’elle est, à l’égard des bailleresses, une occupante sans droit ni titre.

La société Locataire forme un pourvoi. Elle soutient que les parties peuvent conventionnellement déroger aux dispositions de l’article L. 145-31 du Code de commerce, selon lesquelles la régularité d’une sous-location commerciale est subordonnée à l’autorisation du propriétaire et à l’appel de ce dernier à concourir à l’acte de sous location.

Elle se prévaut d’une part  d’une clause insérée dans le contrat de bail commercial aux termes de laquelle le locataire était autorisé à sous-louer une partie de l’ensemble de locaux, dont l’indivisibilité avait été convenue entre les parties, sous la seule réserve du respect de la procédure contractuellement prévue impliquant seulement l’obtention d’une autorisation de la sous-location du bailleur, après communication à ce dernier de l’identité du sous-locataire et de l’activité commerciale envisagée.

Elle en déduit donc que les parties avaient entendu déroger à l’exigence légale du concours, alors que le bail principal se poursuivait et que, la sous-location produisant ses effets dans les rapports entre locataire principal et sous-locataire, le bailleur ne pouvait agir en expulsion de ce dernier.

D’autre part, le sous-bail conclu en méconnaissance des dispositions de l’article L. 145-31 du Code de commerce relative au concours du propriétaire à l’acte est inopposable à ce dernier, mais n’est pas nul. La sous-location irrégulièrement consentie produit tous ses effets dans les rapports entre le locataire principal et le sous-locataire, tant que le premier a la jouissance des lieux sous-loués.

Ainsi le bailleur est juste tenu de garantir la jouissance du bien loué à son locataire tant que dure le bail commercial  et ne peut poursuivre directement l’expulsion du sous-locataire, auquel il n’est uni par aucun lien juridique.

La Cour de cassation suit cette argumentation puisque le bail principal se poursuit et que, la sous-location produisant seulement ses effets dans les rapports entre la locataire et la sous-locataire. Dans ces conditions, le bailleur ne pouvait agir en expulsion de cette dernière.

(Cass. 3ème civ, 1er février 2012, n° 10-22.863)

 

Guillaume PIERRE – Avocat à la Cour

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